Le suicide adolescent

De nombreux écrits sont disponibles sur le suicide en général et le suicide adolescent en particulier. Nous en proposons quelques-uns ici, parsemés au fil du texte, que nous vous invitons à lire pour aller plus en profondeur.

Nous nous contenterons de reprendre quelques notions qui nous paraissent essentielles et qui expliquent l’importance de prendre au sérieux des comportements qui peuvent paraître peu inquiétants ; qui expliquent surtout pourquoi ASMA continue à veiller, même des mois après une crise suicidaire.

On meurt peu à l’adolescence.

En effet, la part de la population adolescente dans la mortalité par suicide est faible, particulièrement avant 15 ans. Le suicide est néanmoins la seconde cause de décès des 15-24 ans, après les accidents de la route.

« L’adolescence représente dans la vie de chacun un moment exceptionnel. Une seule fois dans l’histoire d’une personne s’associent des changements physiques, psychologiques et sociaux (…) A la différence de l’enfance et de la vieillesse, où les évolutions se font de manière progressive ou partielle, l’adolescence est un bouleversement complet, en rupture avec la période précédente, même si elle se trouve dans son prolongement » (« Adolescences, repères pour les parents et les professionnels », sous la direction de Philippe Jeammet, Editions La Découverte)

De ce fait, elle est « une période plus susceptible d’engendrer des comportements suicidaires » (Site Psychomédia). Le suicide adolescent a des spécificités propres, au rang desquels, la rapidité du processus de la crise suicidaire. « Le processus suicidaire est la période qui sépare le moment où la crise survient et le passage à l’acte. À l’adolescence, cet intervalle peut être très court. » 

Par ailleurs, les filles tentent plus de se suicider que les garçons et les garçons se suicident plus que les filles. Les raisons sont multiples et complexes, et de nombreux écrits sont disponibles sur ce sujet. Si nous le mentionnons ici, c’est surtout pour tenter de désamorcer un cliché que l’on entend souvent et qui est dommageable aux personnes, adolescents ou pas, en situation de mal-être et de crise suicidaire, en ce qu’il ne prend pas en compte la profondeur de la douleur et des difficultés qu’ils traversent : il s’agit de l’idée reçue selon laquelle une tentative de suicide n’est qu’un « simple » appel au secours.

La mise en danger qu’implique la tentative de suicide est à elle seule assez inquiétante pour que chacune d’entre elles soient prises au sérieux. L’appel au secours n’est jamais anodin et surtout, il appelle une réponse, une réaction de l’entourage, une prise au sérieux de la douleur qui est incontestablement à son origine.

Une des grandes idées fausses concernant le geste suicidaire est qu’il implique forcément une volonté de mourir, de « tuer soi-même », comme l’étymologie le laisse entendre. Ce n’est pas forcément devant que l’on regarde et ce n’est que rarement la mort qui est le but. Elle est plutôt la seule solution qui semble rester quand toutes les autres ont disparu. Selon Xavier Pommereau, psychiatre, « La raison apparente d’un geste suicidaire témoigne d’un sentiment jugé indépassable d’abandon, de perte ou d’effondrement identitaire » .

La tentative de se sortir d’une situation difficile ou qui paraît désespérée, ce n’est finalement pas du tout la même chose que la volonté de mourir.

La tentative de suicide est ainsi un acte paradoxal, comme l’explique le pédopsychiatre Philippe Jeammet :

« Le paradoxe, c’est que la tentative de suicide est un geste d’existence. Toutes les attaques contre soi, toutes les attitudes violentes et destructrices, répondent à une déception qui est à la mesure de la très forte volonté d’exister qui se cache derrière, mais face à laquelle certains se sentent impuissants et incapables d’exercer leurs envies de manières positives. »

Il n’y a donc aucun sens à parler de suicide « raté », puisqu’on est « toujours là ». C’est au contraire l’espoir qui subsiste, et une chance d’entendre un appel à l’aide qui traduit une volonté de vivre, de devenir soi-même et de prendre toute sa place.

Dans le poème La Ralentie (« Lointain intérieur, 1938), Henri Michaux écrit ces lignes :

« Autrefois quand la terre était solide, je dansais, j’avais confiance. A présent, comment serait-ce possible ? On détache un grain de sable et toute la plage s’effondre, tu sais bien. »

Ainsi, chaque grain de sable compte, un parent attentif, des amis soutenants, un accompagnement psychothérapique, un coup de fil de temps en temps, quelqu’un qui s’inquiète et qui veille, pour que la plage ne s’effondre pas.

 

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